Une guerre inutile, par Jimmy Carter

Voici un témoignage de première main sur les évènements qui ont précédé le conflit. L’ancien président Jimmy Carter, alors en visite au Proche Orient, a rencontré en mars dernier les dirigeants du Hamas et contribué au dialogue qui a permis la conclusion de la trêve. Israël s’était alors engagé à rétablir les approvisionnements de Gaza à un niveau normal en échange de la fin des tirs de roquettes. Les dirigeants du Hamas à Damas s’étaient également déclarés prêts à appliquer tout accord de paix signé par l’Autorité Palestinienne, après ratification par un referendum. Las, le niveau des livraisons autorisé par Israël n’a été que de 20% de la normale, et l’attaque israélienne du 4 novembre sur un tunnel à Gaza - que Carter qualifie de « défensif, »notons le - ont mis fin à la trêve. De retour dans la région en décembre, Carter tentera une nouvelle médiation de la dernière chance. Il rapporte que les dirigeants israéliens ont alors officieusement proposé de reprendre les livraisons à un niveau de 15% par rapport à la normale en échange d’un arrêt des tirs de 48 heures. Proposition évidemment refusée par le Hamas. On connaît malheureusement la suite de l’histoire.
Par Jimmy Carter, Washington Post,
Par Jimmy Carter, Washington Post,
Je sais, de par mon engagement personnel, que les effets dévastateurs de l’invasion de Gaza par Israël auraient pu aisément être évités.
Après avoir visité Sderot en avril dernier et constaté les dommages psychologiques graves causés par les roquettes qui étaient tombées dans cette zone, ma femme Rosalynn et moi-même avons affirmé que leur lancement à partir de la bande de Gaza était un acte de terrorisme inexcusable. Bien que les victimes soient rares (trois morts en sept ans), la ville a été traumatisée par ces explosions imprévisibles. Environ 3000 habitants se sont déplacés vers d’autres villes, et les rues, les terrains de jeux et les centres commerciaux étaient presque vides. Le maire, Eli Moyal, avait réuni un groupe de citoyens dans son bureau pour nous rencontrer, et ils se sont plaints que le gouvernement d’Israël ne mette pas un terme à ces tirs de roquettes, soit par la diplomatie, soit par une action militaire.
Sachant que nous allions bientôt rencontrer des dirigeants du Hamas de la bande de Gaza et à Damas, nous nous sommes engagés à évaluer les perspectives d’un cessez-le-feu. Omar Suleiman, le chef des services de renseignements égyptien, qui menait la négociation entre les Israéliens et le Hamas, nous a appris qu’il y avait une différence fondamentale entre les deux parties. Le Hamas voulait un cessez-le-feu en Cisjordanie et à Gaza, alors que les Israéliens refusaient de discuter sur autre chose que la bande de Gaza.
Nous savions que les 1,5 millions d’habitants de Gaza étaient affamés. Le rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l’alimentation a constaté que la malnutrition aiguë dans la bande de Gaza était de même ampleur que dans les nations les plus pauvres du sud du Sahara, avec plus de la moitié de toutes les familles palestiniennes ne mangeant qu’un seul repas par jour.
Les dirigeants palestiniens de Gaza ont été évasifs sur toutes les questions, faisant valoir que les roquettes étaient la seule façon de répondre à leur emprisonnement et d’attirer l’attention sur cette situation humanitaire. Les hauts dirigeants du Hamas à Damas ont cependant accepté d’envisager un cessez-le-feu à Gaza seulement, à condition qu’Israël n’attaque pas la bande de Gaza et permette que des chargements humanitaires soient livrés aux citoyens palestiniens normalement.
Après de longues discussions avec ceux de la bande de Gaza, les dirigeants du Hamas ont également décidé d’accepter tout accord de paix qui pourrait être négocié entre les Israéliens et le président de l’Autorité Palestinienne Mahmoud Abbas, qui dirige également l’OLP, à condition qu’il soit approuvé par un vote à la majorité des Palestiniens dans un référendum ou par un gouvernement d’unité nationale élu.
Comme nous étions seulement des observateurs, et non des négociateurs, nous avons relayé cette information aux ةgyptiens, et ils ont continué à œuvrer pour la proposition de cessez-le-feu. Après environ un mois, les Egyptiens et le Hamas nous ont informé que toute action militaire par les deux parties et tous les tirs de roquettes cesseraient le 19 juin, pour une période de six mois, et que les livraisons humanitaires seraient rétablies au niveau normal existant avant le retrait d’Israël en 2005 (environ 700 camions par jour).
Nous n’avons pas été en mesure de confirmer ceci à Jérusalem en raison du refus d’Israël de reconnaître toute négociation avec le Hamas, mais les tirs de roquettes ont rapidement cessé et il y a eu une augmentation des

Lors d’une autre visite en Syrie à la mi-Décembre, l’échéance se rapprochant, j’ai déployé des efforts pour que la période de six mois soit prolongée. Il était clair que le principal problème était l’ouverture des points de passages vers la bande de Gaza. Des représentants du Centre Carter se sont rendu à Jérusalem, ont rencontré des responsables israéliens et leur ont demandé si cela était possible, en échange de la cessation des tirs de roquettes. Le gouvernement israélien a officieusement proposé que 15% de l’approvisionnement normal pourrait être accordé si le Hamas arrêtait en premier tous les tirs de roquettes pendant 48 heures. C’était inacceptable pour le Hamas et les hostilités ont éclaté.
Après 12 jours de « combat », les forces armées israéliennes ont indiqué que plus de 1000 cibles ont été bombardées ou pilonnées. Durant cette période, Israël a rejeté les efforts internationaux visant à obtenir un cessez-le-feu, avec le plein appui de Washington. Dix-sept mosquées, l’American International School, de nombreux logements et une grande partie de l’infrastructure de base de cette petite région très peuplée, ont été détruits. Cela inclut les réseaux d’eau, d’électricité et d’assainissement. Les courageux volontaires médicaux venus de plusieurs pays font état de lourdes pertes parmi les civils, et certains doivent soigner les blessés à la lumière fournie par des générateurs électriques.
Il faut espérer que lorsque la prolongation des hostilités n’apportera rien de plus, Israël, le Hamas et les ةtats-Unis acceptent un nouveau cessez-le-feu, à partir duquel les tirs de roquettes cesseront et un niveau adéquat d’aide humanitaire sera accordé aux Palestiniens réduits à la survie. Cet accord au contenu rendu public serait contrôlé par la communauté internationale. La prochaine étape possible serait alors une paix permanente et globale.
Publication originale Washington Post,
Source de la traduction Contre Info
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